Une passion qui se confirme: La photographie de Baudouin Mouanda

Les séquelles de la guerre © Baudouin Mouanda
Les séquelles de la guerre © Baudouin Mouanda
On le côtoie dans le Hall du centre culturel Français, à la cité muni de son appareil, prêt à immortaliser un événement. Il s’appelle Baudouin Mouanda , photographe Congolais. Il a fait partie des 30 candidats présélectionnés parmi 4000, par le jury du grand prix paris Match et SFR, dans le cadre du concours « photoreportage étudiant » que le magazine « Paris Match » a lancé en mai 2005.

Que de chemin parcouru par « phototouin » petit nom que lui donne ses amis au C.E.G de l’amitié. A l’époque, encore novice, Baudouin se perfectionne petit à petit aux cotés de son père qui enseigne la sciences physique en classe de troisième. Aujourd’hui, Baudouin sort résolument du conformiste (photo studio, de famille, photo souvenir, portrait) et pose un regard récriminatoire sur les guerres à répétition que le Congo a connues. En effet, il fait le tour du propriétaire en mettant en exergue les souffrances, les inégalités, les injustices…Bref, la douleur de tout un peuple. Il immortalise ce que les mots ne peuvent dire à travers les images fort impressionnantes, allant d’une maison criblée de balle a un bâtiment abandonné, en passant par le regard troublant d’un groupe d’adolescents. Des photographies des singulières et symboliques, en relation étroite avec les événements dont les Congolais furent victimes. Derrières ces images dénonciatrices, dérangeantes, la démarches de Baudouin est évocatrices. Ainsi, ses photos ne laissent pas indifférent celui qui les parcours. Il retrace sans complaisance les séquelles de la guerres de 93, 97 et 98. « huit ans après la guerre civile au Congo. Je reviens pour la première fois sur les lieux de mon enfance. je me laisse aller. Je marche sans trop savoir où je vais. J’observe, j’enregistre et partout, un seul constat : les rues sont dégradées, les bâtiments ne sont pas repeints. Chemins de fer et écoles, rien n’échappe à ce spectacle de désolation » souligne -t-il. Esthète avant tout, Baudouin ne laisse rien au hasard, il explore, travaille sans relâche ses images, se remet en question et le résultat est étonnant.


Il nous ouvre ainsi les yeux sur ce qui nous échappe ; il met donc en évidence l’invisible ; il exprime et partage ses joies, ses angoisses. Résident à

portrait de Baudouin Mouanda
portrait de Baudouin Mouanda
Kinsoundi , il met en évidence les locaux délabrés de l’usine de Kinsoundi où des sinistrés vivent dans les conditions déplorables. Jeunes et engagé, il s’intéresse au travail des jeunes qui, au sortir de la guerre se sont regroupés pour exprimer leur ras-de-bol à travers des cris de revolte, de colère, par le biais du « hip hop » « le courant hip hop » s’est engagé après la guerre à faire compagne pour la paix et la liberté d’expression. Les rappeurs chantent leur colère, leur révolte et exorcisent leurs souvenirs de guerre peuplés de fuite et de morts. Les immeubles bombardés servent de studio de répétition. Ils s’y retrouvent, travaillent leurs textes et dansent devant les enfants désoeuvrés de la ville. Baudouin se fait l’avocat de tout un peuple. Il véhicule et dénonce à travers ses photographie les atrocités de la guerre que l’on a nommé « la bêtise humaine » . Un réquisitoire sur la justice qui ne laisse pas indifférent.

Etudiant en Droit, lauréat du 1er prix du concours professionnel organisé par la maison du film Spector à Kinshasa , qui a connu la participation des photographes des deux Congo, en 2003. Elu meilleur photographe par le jury de l’academie de beaux arts à Kinshasa et récemment au 5eme jeux de la francophonie à Niamey (Niger) où il a représenté le Congo en 2005 avec son travail de création photographique RACINE , sélectionné trois fois au concours international organisé conjointement à paris match et SFR, il a fait partie des 30 candidats sélectionnés parmi 4000 pour le grand prix du photo reportage étudiant Paris Match /SFR…. Baudouin est né le 22 juin 1981 à Ouésso , dans la région de la sanga au Congo . La photo, il l’a faite depuis son très jeune âge. Il manipule l’appareil photo de son père absence. Mais comme tout enfant, il a peur du flash qui se dégage du l’objectif.

En 1993, lorsqu’il passe en classe de 6ème, son père lui offre un appareil avec pellicule à l’intérieur. Il lui reste trois poses. Excité et heureux, il fait ses premières armes. Les photos sont belles et les l’encouragent. Confiant après cette première tentative, il s’offre sa première pellicule. Malheureusement cette deuxième expérience est désastreuse. Sur les 36 poses, seulement sept sont visible. « Mes amis étaient méconnaissables sur les photos. Je suis sorti du laboratoire humilié et surtout triste. Suite à cet échec je ne touchais plus à mon appareil pendant un moment » . Cet éloignement n’est qu’éphémère car sa passion pour la photo plus vivace et plus brûlante l’amène en classe de 5ème à devenir le photographe attitré de son école. D’où le nom de photouin. A partir de ce moment le 28mm ne lui quitte plus son cou, non pas pour frimer comme à ses débuts, mais plutôt par passion pour immortaliser les événements qui lui tiennent à cœur. « Je déambulais librement dans la cour avec mon appareil à mon cou pendant la récréation. Les élèves, les professeurs et même la directrice me conviaient pour les photographier » . Bientôt sa passion pour la photo inquiète son père qui ne veut pas que son fils sacrifie ses études, au profit de la photo. « A la maison, papa s’inquiétait. Il ne voyait pas d’un bon œil ma passion pour la photo, au détriment des études plutôt aimerait me voir Juriste un jour. C’est ainsi qu’il m’obligeait à faire signer mon cahier à la fin des cours. C’était le prix à payer pour garder sa confiance » .

Pour voir quelques photographies de Baudouin Mouanda, rendez vous sur la galerie du Collectif Génération Elili.