« Un regard », une poésie brutale à Kinshasa

Pour se réchauffer de ce début d’hiver rigoureux, nous vous emmenons pour l’interview du jour à Kinshasa dans l’univers singulier de Kiripi Katembo. A travers sa série « un regard », il nous livre une poésie brutale où le réel kinois semble en suspension. Kiripi Katembo ouvre une fenêtre, où photo et texte ont toujours une histoire à raconter. Travaillant à la fois la photo et la vidéo, il fera parti des artistes à suivre de près dans le futur…

Peux-tu nous présenter ton parcours professionnel ?

Après la peinture, j’embrasse la photographie et la vidéo à 27 ans. C’est au cours d’un workshop organisé par l’Académie des Beaux-arts de Kinshasa et par l’Université des Arts Décoratifs de Strasbourg que je réalise avec une petite caméra numérique de poche mon premier film expérimental « Voiture en Carton » qui participe au festival Pocket Film au Centre Pompidou à Paris en 2008. En cette même période  je débute la photo avec  un petit appareil photo de 5mega pixel.

naitre © Kiripi Katembo
naitre © Kiripi Katembo


Avec mes collègues du workshop sur la vidéo nous avons créé le collectif YEBELA, un collectif de jeunes vidéastes et photographes. Avec notre collectif nous avons réalisé un projet photo et vidéo sur le quotidien Kinois, un projet qui fut présenté au musée national de Kinshasa et dans les rues de la capitale.

En 2009 je réalise la série un regard… puis je participe avec une photo de la série à la première biennale de la photographie Afrikaribu. J’ai aussi participé comme assistant à la scénographie urbaine avec le collectif Ezaposible. C’est avec la société de production SUKA de Mr Djo Munga que j’ai réalisé le film documentaire « Après Mine » et « Symphonie de Kinshasa »  

En 2010 j’ai participé avec quatre photos de la série « Un Regard… » à la biennale de la photographie et de l’image PICHA.

Tu travailles à la fois la vidéo, le cinéma et la photographie. Comment s’articulent ces différentes facettes de ta démarche ?

Mon travail d’art en vidéo m’a permis de bien intégrer techniquement et artistiquement le monde du cinéma en donnant un cachet particulier à la réalisation des films de commande. C’est aussi dans certains projets cinématographiques que j’en profite pour faire un travail d’art sur le même sujet, car Djo Munga qui est mon producteur savait que je suis artiste et m’a beaucoup aidé dans la bonne organisation de mon temps de travail d’art (photo, vidéo) et de cinéma.

mutiler © Kiripi Katembo
mutiler © Kiripi Katembo

Tu fais partie du collectif « Yebela », collectif de cinéastes et photographes. Peux-tu nous en parler et nous présenter les membres du collectif et vos projets communs ?

Le collectif YEBELA est né en 2008 après un workshop réalisé par l’Académie de Beaux-arts et l’Ecole Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg. Il était composé de jeunes vidéastes et photographes : Rhunod Panzu (vidéaste et photographe), Roger Kangudia (photographe) et Tange Shongo (vidéaste et performeur) et moi même qui ont tous participé au workshop.

Nous sommes un collectif qui réalise et produit des projets photographiques, vidéographiques d’art.

En 2009 nous avons réalisé et produit un projet photo, vidéo sur le quotidien Kinois, un projet qui fut présenté au musée national de Kinshasa.

Actuellement  nous sommes en train de préparer le Mois de la Photographie et de la Vidéo pour 2011.

devenir © Kiripi Katembo
devenir © Kiripi Katembo

Il y a une vraie cohérence dans ton travail « Un regard » entre tes photos et leur titre très symbolique. Pourquoi et comment as-tu procédé pour réaliser cette série ?

Intéressé par un décor urbain très complexe qui change depuis quelques années, je me suis mis à prendre des photos. Stoppé par les regards de la population qui n’aimait pas être photographiée, je suis allé vers l’eau, un élément qui faisait partie de mon environnement et qui m’a permis de détourner les regards pour continuer à prendre naturellement des photos de l’homme dans son milieu.

En exposant ces photos à l’envers, j’ouvrais une fenêtre sur un autre monde de mon milieu. Quand j’ai regardé chaque photo, pour moi il y avait toujours un sujet, un titre, une histoire à raconter sur mon pays.

Ta recherche photographique, très poétique, semble très portée sur l’esthétisme. T’inspires-tu du travail d’autres artistes ? Lesquels ?

En quittant la peinture, je cherchais à faire un travail photographique très proche de la peinture. Dans l’idée qu’une photo devrait être pour moi semblable à une peinture. En regardant les peintures de l’artiste Patshi Tshindel, Vitshoi, Basquiat etc.qui ont beaucoup travaillé sur des sujets qui touchent les milieux urbains.

Ce travail a été exposé récemment aux Rencontres de Picha, festival de Lubumbashi. Comment a -t-il été reçu par le public ? Était-ce la première fois que tu le présentais au Congo ou la première fois que tu l’exposais? Peux-tu nous raconter ton expérience sur ce festival ?

J’étais heureux! Le public est resté longtemps devant les photos en les observant. Ils cherchent à la fois à savoir comment la saleté pouvait être présentée sous une forme qui ne choque pas mais qui plutôt attire.  

La première fois, j’avais exposé deux photos de la série « Un Regard ». C’était lors d’une exposition commune du collectif « YEBLA » au Musée National de Kinshasa. La deuxième fois c’était la biennale « Afrikaribu » où j’avais présenté deux photos de la série, une exposition qui avait plu au public ce qui m’avait motivé pour continuer le travail sur la série « Un regard… » la  troisième fois c’est au cours d’un atelier dénommé« In situ » un atelier animé par Gody Lei et organisé par le collectif « Ezapossible » Et la quatrième fois à la Biennale « PICHA » où j’ai présenté quatre photos de la série « Un Regard » une biennale qui a connu une très forte participation des artistes photographes, vidéastes et professionnels de l’art  qui ont aussi énormément apprécié mon travail.

subir © Kiripi Katembo
subir © Kiripi Katembo

Tu as collaboré à plusieurs documentaires « Congo en quatre actes, Les Femmes qui attendent », « Kinshasa symphony » ou encore « Voiture en carton » que tu as réalisés au téléphone mobile. Quels sont tes projets actuels en cinéma ?

Je suis actuellement en train de réaliser un film documentaire sur la vie d’un jeune sapeur qui s’appelle Modogo. Dans le film je souhaite présenter une autre vie que le gens ignorent d’un sapeur.

Quels sont tes projets à venir ? En photo ?

Avec le manque d’espace ou lieu d’expression artistique qui existe dans mon pays, je souhaite créer un espace de travail, d’exposition et de projection des œuvres arts photographiques et Vidéo.

Réaliser un travail photographique sur la mémoire de Lumumba dans une architecture qui a habité ses actions historiques. Ce travail de photomontage  consiste à trouver les bâtiments témoins silencieux de l’histoire et sosies dans les différent lieux et pays où Lumumba a travaillé, posé des actes. Puis revenir dans ces mêmes décors ou bâtiments pour exposer mon travail.

rester © Kiripi Katembo
rester © Kiripi Katembo