Bamako/Paris, regard croisé

Lundi 5 Janvier, 18h, quelques heures avant la fin de cet échange de regards nous rencontrons les photographes du projet Bamako Paris en photo . Camille Millerand , 23 ans, partage son temps entre un BTS photo à l’ AFOMAV à Paris et un emploi de retoucheur numérique au sein du collectif « L’oeil public «  . Fatoumata Diabate , 26 ans, a été formée à Promo Femme et au CFP pour la photographie. Elle vit actuellement entre son travail d’assistante au CFP (Cadre de Promotion pour la Formation en Photographie) et sa carrière photographique. Sélectionnée en 2005 lors des 6èmes Rencontres de Bamako , elle a obtenu le prix de l’AFAA (Cultures France, Afrique en Créations).

Camille et Fatoumata © afrique in visu
Camille et Fatoumata © afrique in visu
Comment est né ce projet ?

Camille : Ce projet est d’abord né d’une rencontre entre Gilles Coulon ->http://www.tendancefloue.net/photographes/gilles_coulon/index.php] (photographe du collectif Tendance Floue ) et [ Youssouf Sogodogo (Directeur du CFP ). Lors de mon stage chez Tendance Floue, j’ai découvert le livre Avoir 20 ans Bamako de Gilles Coulon sur lequel j’ai flashé. J’avais envie de partir photographier au Mali à travers un échange de regards avec un(e) photographe malien(ne). J’en ai parlé à Gilles qui m’a immédiatement soutenu en prenant contact avec le CFP et son directeur.

En 2005, j’ai décidé de me rendre à Bamako pour réfléchir au projet.

Quelques jours avant, Fatoumata Diabate m’a contacté pour me faire part de l’intérêt qu’elle portait à cet échange. Cette première phase a permis de prendre des contacts mais aussi que Fatoumata et moi-même échangions autour de la photo. 


En quoi consiste ce projet ?

Camille et Fatoumata : Nous avons décidé de croiser notre expérience en photo et nos regards.

Nous nous sommes attachés à la diaspora malienne de la région parisienne et aux maliens de la région de Bamako. Cela nous intéressait de confronter la jeunesse et son quotidien.

Comment s’est passé ce projet sur le terrain ?

Fatoumata : Je me suis rendue à Paris entre le 6 Octobre et le 6 décembre 2006.

Au départ, Camille avait pris contact pour moi dans une maison de jeunes en Seine St Denis. Je devais, en échange de les photographier, animer un atelier photo. Mais les jeunes n’ont pas été très réceptifs et le contact a été difficile.

Je me suis finalement tournée vers des adultes maliens, nés à Bamako mais vivant en France, que je connaissais du Mali. C’est ainsi que j’ai pu photographier leur quotidien.

Tout cela n’a pas forcement été facile car les gens ne comprenaient pas que je m’immisce dans leur vie et que je fasse autant de photos.

Heureusement j’ai pu profiter du laboratoire de « Tendance Floue » pour voir le résultat de mon travail au fur et à mesure.

Camille : Je suis venu à Bamako du 6 décembre 2006 au 6 février 2007.

Fatou avait suivi le quotidien des maliens en France, du chemin du travail en passant par leur métier et jusqu’à chez eux.

Tout cela en réussissant à respecter leur intimité et l’anonymat des personnes photographiées.

Moi, je ne me voyais pas réaliser cela de la même manière à Bamako.

Au départ, j’avais envie de photographier les jeunes dans leur cour.

Je me suis posé des questions quant à quel quartier je devais couvrir avec ce projet, mais on s’est aperçu avec Fatoumata que la majorité des personnes qu’elle avait photographiées venaient du quartier Badialan. De plus lors de mon précèdent voyage en 2005 j’habitais dans ce quartier. J’ai donc retrouvé des jeunes qui savaient que je devais revenir pour la réalisation du projet. Les portes se sont alors ouvertes…

En parallèle à ce quartier populaire, j’ai réaliser une série d’images dans les quartiers périphériques où la vie est très différente, moins traditionnelle plus aseptisée.

J’ai partagé mon regard entre la vie des hommes et des femmes.

Je me suis attaché à toutes les tranches d’âge et j’ai essayé de retranscrire les liens familiaux.

Différentes figures tel que le jeune papa, qui n’étant pas marié, ne vit pas avec sa femme ou encore les jeunes femmes qui viennent de se marier.

J’ai donc photographié des jeunes de 12 à 30 ans. Je me suis inspiré de leur problématique et de ce qu’ils me racontaient de leur quotidien.

J’ai eu un bon rapport avec toutes les personnes que j’ai photographiées. J’ai essayé de montrer les diverses activités telles qu’un grin sur un toit, les jeunes qui font de la musculation et les jeunes qui jouent à la console.

bkoparis2.jpgQu’avez-vous retenu de cette expérience ?

Fatoumata : Cela m’a beaucoup apporté car cela m’a permis de me rapprocher de la diaspora malienne en France. J’aimerais continuer le projet avec Camille.

C’était un moment important pour moi car je n’avais pas l’impression d’être en France, c’était comme le Mali, la solidarité se ressentait.

Camille : Je comprends mieux leur quotidien ici et ce qui peut leur manquer quand ils viennent en France.

Je trouve que les jeunes maliens du Mali, par rapport à ceux de France, sont très fatalistes. J’en ai vu qui se battaient bien sûr. Mais d’autres, qui ont du potentiel, baissent les bras. J’ai aussi mieux compris le poids de la famille pour une fille et pour un garçon.

De quelle manière travaillez-vous ?

Camille : Nous travaillons tous les deux en 24×36 argentique, Fatoumata en noir et blanc et moi en couleur. Nous avons utilisé chacun près de 80 films

Quels sont vos partenaires ?

Camille : la Direction de la jeunesse et des sports en Seine St Denis (bourse Défi Jeune), le conseil général de Seine St Denis Via le Monde et la mairie d’Aubervilliers.

Le projet est-il clos ?

Camille et Fatoumata: Peut-être que nos travaux vont nous faire penser à d’autres choses à traiter… Ce regard peut continuer. Il sera abouti lorsqu’on aura fait une grande exposition présentant l’intégralité du projet.