Un petit historique de l’évolution du Musée des arts derniers depuis sa création…
Le Musée a ouvert en 2003. L’accent été mis vers la sculpture du Zimbabwe, et la peinture au départ. Petit à petit les installations et la photographie se sont installées.
Ma curiosité m’a amené à la photo et vidéo. De plus, ce sont des domaines qui remettent en question des idées reçues. Il y a beaucoup d’ironie et de deuxième degré dans ces deux domaines.
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- Musée des Arts Derniers, Nigéria © Guy Hersant
Le Musée des arts derniers ne présentent que l’art africain ?
C’est le fil directeur mais je peux présenter des artistes de bonne qualité d’autres continents.
On m’a présenté des tableaux d’artistes aborigènes mais cela ne m’intéresse pas car cela va en dehors de ce que je veux présenter de l’art africain. C’est le contre exemple de ce que je veux faire avec l’art africain : on présente en effet les artistes aborigènes comme un bloc homogène et sans beaucoup d’individualité originale.
La plupart des galeries consacrées à l’Afrique présentent exclusivement des artistes africains. Pourquoi avez-vous choisi de présenter à la fois des artistes africains et des artistes étrangers ?
Cela s’est fait dès le début de la création du Musée avec l’exposition "Aller retour Harare-Paris-Harare" .
Je souhaitais ouvrir un espace dont le fil conducteur serait l’Afrique mais l’origine du continent africain ne devait pas être un critère de sélection des artistes afin de ne pas créer un ghetto de plus. Ces critères et ghetto sont des dangers qui limitent la progression des acteurs du monde de l’art.
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- © Malick Sidibé
Au niveau du marché de l’art, un artiste étranger travaillant sur l’Afrique ou un artiste africain ont-ils le même marché…
En schématisant, il y a deux types de collectionneurs et de marché :
Les amateurs d’art contemporain qui recherchent un bel objet et qui sont prêt à mettre le prix. L’origine leur est égale, ils cherchent avant tout une qualité artistique. Puis il y a les acheteurs liés à l’Afrique et là cela devient plus complexe.
Présentez-vous des talents photographiques émergents ?
Pour l’instant j’ai du mal à réfléchir en terme d’âge. Cela est très complexe, il y a des artistes qui sont reconnus mais qui n’ont pas été bien mis en valeur. J’ai donc plutôt envie de travailler sur le long terme autour de ce que l’on peut apporter à l’œuvre et aux artistes.
Le problème de l’Afrique, c’est que c’est un sujet très glissant. Malick Sidibé en est le meilleur exemple, il est super connu mais pas pour les bonnes raisons. Les gens s’attachent au style 70’ que dégagent ses images alors qu’il y a bien plus que cela.
Depuis la création de la FIAD Foire Internationale des Arts Derniers, Les Afriques, dont il y a déjà eu deux éditions, la scène qui s’offre à la création contemporaine africaine s’est-elle élargie ?
Il y a eu une évolution positive, dans le sens où les artistes se sont fait connaître de manière individuelle dans des lieux d’art contemporain. C’est très important d’être montré individuellement.
Le danger des expositions collectives est le suivant : "Africa Remix" par exemple veut donner une image au public d’amateur contemporain et en même temps, on veut faire un truc un peu exhaustif, en présentant des artistes comme Chéri Samba , Bruly Bouabre ou Tokoudagba hors contexte. Au final, tout le monde va être déçu (critiques d’art et amateurs) et cela dessert les artistes.
"Le Musée des Arts derniers" est-il partenaire ou organise-t-il des évènements en dehors de ses locaux parisiens et en Afrique en particulier ?
Nous créons un réseau alternatif dont "le Musée des arts derniers" est le QG en France. On s’est jumelé avec l’espace Tchif au Bénin créé en 2007,la Galerie Chab à Bamako et Solly Cissé au Sénégal (Dakar). Nous tissons un réseau en dehors du système officiel qui échangera ses expositions.
Le point de ralliement sera en juin 2008, une foire d’art contemporain africain organisée à Tenerife aux Canaries. Je l’organise pour renforcer ces liens et le marché de l’art. C’est la première foire d’art contemporain africain.
Pourquoi les Canaries ?
Car c’est au carrefour de l’Afrique, l’Europe et l’Amérique. De plus il y a une volonté de changer leur image de carrefour d’immigration.
- Oliver Sultan dans la galerie du musée des Arts Derniers
Vous vous intéressez particulièrement à développer le marché de l’art africain. Par exemple, vous avez organisé une vente aux enchères de votre collection le 2 avril 2007. Pouvez-vous nous expliquer ce combat ?
En France, le chaînon manquant pour la promotion de l’art africain est la cote des artistes, le marché. Il y a plein d ’institutions qui mettent en avant cet art comme l’Afaa (Cultures France) mais il y a un fossé entre ces institutions et les galeries, il n’y a pas de pont entre les deux. Les institutions ne collaborent pas avec les galeries. Art et Argent ne vont pas malheureusement pas ensemble en France, contrairement aux pays anglo-saxons. Les mécènes de l’art africain déconnectent et décontextualisent l’art africain. Les artistes sont déconnectés du marché alors qu’ils ont besoin d’être partie prenante du marché.
Et cette vente, a-t-elle été le bon marqueur pour rendre compte du marché ?
Oui car j’avais placé comme prix de réserve les prix de galerie pour tirer vers le haut. J’ai donc vendu la moitié des œuvres, mais à des prix des galeries. La vente n’a pas atteint des prix délirants, cela montre qu’il y a du chemin à faire.
Vous écrivez sur l’art africain ?
Oui, évidemment. A la fois des articles et des livres comme "Africa urbis" et "les Afriques" qui parlent d’art africain ou encore "Life in stone », livre sur la sculpture du Zimbabwe.
J’écris souvent des textes pour des artistes dans des catalogues. Pour la prochaine exposition que je vais faire sur la photo africaine, je pense écrire un livre sur ce sujet.