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- © Philip Poupin
J’avais entendu que les journalistes passaient par le Tchad pour se rendre au Darfour et j’avais un contact là bas ainsi en août, j’y suis parti. J’ai mis 10 jours pour obtenir un permis de voyager afin de sortir de la capitale et me rendre à Abéché.
J’avais déjà en tête l’idée de réaliser un reportage sur place plutôt qu’un mémoire.
Sur place, j’ai pris 2000 photos en n&b au Leica… En comparant un peu mes photos à celles des autres photographes, j’ai pensé qu’il y avait matière à publier.
Pourtant au départ, je voulais surtout écrire. Je ne me sentais pas à l’aise avec un appareil photo comme outil de travail pour rencontrer les gens.
Je ne connaissais pas du tout les ficelles du métier et j’ai édité mon travail sans savoir le faire. Finalement les iconographes, les rédacteurs en chef, les professionnels étaient très sensibles au fait qu’un jeune travaillant un peu en décalé avec son noir et blanc se soit lancé. Ils ont alors regardé mes planches contacts et m’ont aidé à refaire mon éditing.
Après il y a eu le concours Paris Match, je n’avais pas trop envie de le faire car je pense qu’un photojournaliste doit gagner son pain par la presse, je ne trouve pas cela toujours intéressant. Et j’ai finalement gagné le prix Paris Match étudiant en 2005 !
Ce prix m’a permis de venir voir comment travaille la rédaction de Paris Match. C’était encore Alain Genestar qui dirigeait la rédaction de ce périodique. Ce prix comprenait un peu d’argent et une commande de Match, que j’ai réalisée au Niger sur les descendants des esclaves.
Aujourd’hui tu exposes un travail à la galerie Confluences à Paris dans le 20e, sur les populations en fuite dans le nord Kivu ( RDC) intitulée « Partis les mains vides ». Comment s’est déroulé le reportage ? Dans quel cadre es-tu parti ? Et comment est venue l’idée de cette exposition ?
J’ai commencé à m’intéresser au Kivu fin septembre car on commençait tout juste à parler de populations déplacées à ce moment là. Mais les journaux ont mis du temps à se décider. Puis il y a eu pas mal d’autres problèmes comme l’épidémie de choléra qui ont fait passer ce conflit de basse intensité à un conflit de moyenne intensité.
Je suis donc parti au Kivu pendant 15 jours en novembre 2008. J’ai obtenu une bourse pour les frais par une agence américaine à New York. Ce n’est pas dans mon habitude, car normalement, je pars avec mes propres financements mais je revenais à peine d’un voyage de 5 mois en Afghanistan et je n’avais plus d’argent de côté.
J’ai bossé avec 3 journalistes que j’ai rencontrés sur place lors de ce voyage : Thomas Hofnung (Libération), Christophe Boltanski (Nouvel Observateur) et Alex Perry (Time Magazine).
L’idée de l’expo est venu d’ Elise Herszkowicz , chargée de communication à la Galerie Photo de Confluences, qui est ici présente.
Elise : "Dans le cadre de la thématique Afrique : violence extrême en héritage, je cherchais des expositions, comme Fréderic Sautereau. J’ai reçu un mail de la mailing-liste de Philip Poupin qui présentait ce travail sur le Nord Kivu, et je l’ai contacté et l’organisation de l’exposition s’est faite très vite.
En parallèle de l’exposition, il y a une représentation théâtrale ce soir mais la pièce se déroule sur un évènement passé, alors que le Kivu c’est en ce moment encore. Ce sont finalement deux thématiques différentes mais qui se recoupent, accompagnées de débats très riches."
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- © Philip Poupin
Comment s’est faite la sélection des images que tu nous présentes aujourd’hui ici ?
On s’est dit qu’on parlerait davantage des civils dans le cadre de la thématique de Confluences, c’est pour cela qu’on est parti sur ce titre « Partis les mains vides », on voulait parler des fuites et des déplacements de populations.
Tu travailles avec différents types de supports : presse, expositions, web avec ton site internet. Tu as aussi réalisé un documentaire pour Arte sur le Darfour. Que t’apporte l’utilisation de ces différents supports ?
Comme je le disais au début, je n’ai pas forcément choisi le medium photo. Je ne m’intéresse pas vraiment à la photo comme support mais à tous les vecteurs qui peuvent être utilisés sur ces sujets.
Quand à l’exposition, l’intérêt est d’avoir un contact direct avec le public.
En tant que jeune photographe ce contact direct est important car cela te crée un nom dans le milieu, c’est une visibilité en plus.
En ce qui concerne mon blog, je le tenais déjà avant mais je n’ai plus le temps en ce moment. J’aimerai beaucoup l’alimenter plus régulièrement mais cela prend pas mal de temps de prendre des notes.
As-tu produit des reportages en France ?
J’ai travaillé sur le Mont-St-Michel et sur les manifestations anti-CPE en 2005.
Quels sont tes prochains projets et prochaines destinations ?
En ce moment c’est la période où je cherche à exposer, ainsi j’ai un projet d’exposition à Rennes.
Je profite de cette période de pause pour faire fructifier mon travail photo.
J’ai aussi en tête le projet de partir m’installer quelques temps à Nairobi où je suis déjà allé plusieurs fois.
Donc tu te spécialises sur le continent africain ?
C’est un peu l’idée, je n’ai pas forcément envie maintenant de connaître de nouvelles aires….
Mais j’espère continuer mon travail sur l’Afghanistan en parallèle.
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- Philip Poupin lors de son exposition à la galerie Confluences