La belle famille de Photoquai

« We are family », c’est le thème de la prochaine édition de la Biennale des images du monde, en septembre prochain. On lève le voile sur les sélections africaines.

La 5ème édition de Photoquai, organisée par le musée du Quai Branly, aura lieu en septembre prochain. Pour la deuxième année consécutive, c’est Frank Kalero qui a été choisi comme directeur artistique. Directeur du magazine Punctum, basé en Inde, il vit à Sao Paulo (Brésil) et a cofondé le magazine OjodePez (Espagne) et la galerie berlinoise Invaliden1. Entre autres. Un globe-trotter des images donc, qui a choisi cette année de mettre en avant la famille, sous le thème « We are family ». Une famille à entendre (et à voir) au sens large : de l’introspection familiale du Mexicain Fernando Montiel Klint, aux portraits posés des employeurs et de leurs domestiques au Bangladesh de Jannatul Mawa. « La famille est un sujet ouvert, universel et empathique », explique Frank Kalero.

Six commissaires ont été associés, selon les grandes zones géographiques du monde. Pour l’Afrique subsaharienne, c’est Azu Nwagbogu, directeur de l’African Artists’ Foundation et du LagosPhoto Festival qui s’y colle. Dans sa sélection, largement féminine, on retrouve les noms familiers de photographes suivis depuis longtemps par Afrique in Visu comme le Sénégalais Omar Victor Diop, qui fait un carton (critique et commercial) avec sa série « Diaspora », de Paris Photo à la foire 1:54 à New-York. La série « Hââbré, la dernière génération » de l’Ivoirienne Joana Choumali (un de nos coups de cœur de l’année 2014 ! cf Article sur cette série), une série datant de 2009 de Delphine Diallo (France/Sénégal), « Renaissance », en noir et blanc, dans laquelle la photographe a fait poser des membres de sa famille de Saint-Louis du Sénégal, qui jouent le rôle de héros de contes. Namsa Leuba (Suisse) s’est, elle, intéressée à la cosmogonie africaine et aux fétiches. Entre quête des origines et mysticisme, une belle série réalisée entre la Guinée, pays natal de sa mère, et l’Afrique du Sud (cf Interview de Namsa Leuba sur Afrique in visu). La Canadienne Emilie Régnier, née d’un père haïtien et ayant grandie au Gabon, s’est tournée vers les jeunes Maliens, Ivoiriens et Sénégalais qu’elle immortalise au Polaroïd, faisant fusionner contemporanéité et rendu « vintage ». Enfin, le Burkinabé Siaka S. Traoré, né à Douala, au Cameroun, photographe autodidacte, est aussi danseur et propose une série sur les danseurs urbains sénégalais.

Michket Krifa (co-directrice des Rencontres de Bamako en 2009 et 2011) propose 5 artistes dans la section Moyen-Orient, qui couvre aussi l’Afrique du Nord. En plus des Iraniens Hanif Shoaei (« Technology in bed ») et Ali Nadjian et Ramar Manouchehrzadeh (« We live in a paradoxical Society »), la Marocaine Zara Samiry livre un superbe témoignage sur les mères célibataires dans son pays, Myriam Abdelaziz (France/Egypte) s’intéresse au travail des enfants dans les carrières de calcaire du sud du Caire (cf Interview de Myriam Abdelaziz autour de ce travail), dans une série documentaire subtile, tandis que la Tunisienne Faten Gaddès met en scène des Tunisois d’aujourd’hui dans un studio photographique revenu dans les années 30… Un retour vers le futur que l’on a hâte de découvrir.

Frank Kalero explique que le contenu de Photoquai – plus grande exposition photo dans le monde en terme de visiteurs, avec plus d’1 million de personnes à la dernière édition – se doit d’être ouvert, démocratique et critique. Les sélections « africaines » semblent tenir cet engagement. « L’idée est de montrer combien le monde non-occidental peut être source de joie, d’inspiration, de transformation sociale », note Stéphane Martin, le directeur du musée du Quai Branly. Il y aura cette année moins de photographes (40) que lors des éditions précédentes mais « plus d’images par photographes », précise Yves le Fur, directeur du département du patrimoine et des collections, lors du déjeuner de présentation organisé dans les salons Eiffel. En effet, la tour Eiffel est partenaire de la biennale : une photo inédite de chaque photographe sera affichée au premier étage du monument. Une belle tour de babel.

© Omar Victor Diop
© Omar Victor Diop

© Joana Choumali
© Joana Choumali

© Delphine Diallo
© Delphine Diallo

© Namsa Leuba
© Namsa Leuba

© Emilie Régnier
© Emilie Régnier

© Myriam Abdelaziz
© Myriam Abdelaziz

© Omar Victor Diop
© Omar Victor Diop