L’essentiel est invisible pour les yeux

Cette série photographique s’inscrit dans une démarche à la fois conceptuelle et documentaire.

Dans ce travail le photographe explore l’histoire de sa grand-mère à travers les objets restants de la dot de son mariage: cantine en bois fabriquée par son futur époux, pagnes, perles, bouteilles de gin, bassines, miroir etc. Ce sont ces biens que la famille du marié apporte comme symbole pour sceller l’alliance entre deux familles, deux clans, deux ethnies et qui matérialise leurs consentements mutuels. Ainsi, dans une vision de famille élargie, on estime qu’un couple ne se construit pas, par lui seul, mais avec l’aide des proches, et en premier lieu des familles respectives. Ce système aide ainsi à inscrire les couples dans la durée dans une logique communautaire.

En photographiant les restes de cette dot, Ishola Akpo, tente de montrer ce que l’objet ne révèle jamais mais dont il est le témoin muet. Chaque image porte en elle un ensemble de souvenirs vécus par le couple, mais aussi imaginés et fantasmé par le spectateur qui projette ses propres histoires sur les objets. Ces images ont également un potentiel évocateur pour la grand-mère du photographe devenue à la fois objet et sujet du reportage. Ces objets font revivre ses souvenirs et sa mémoire. Ils révèlent aussi l’angoisse de celle qui se sent vieillir et qui souhaite laisser une trace de son passage dans la mémoire familiale.
Ces objets rouillés et usés ont vieilli avec cette femme, ils portent l’empreinte du temps comme elle le porte sur son beau visage buriné, ses rides, ses cheveux gris. Mais ils célèbrent aussi la vie de Dossi.

En parlant de cette histoire personnelle et intime et en mettant en scène sa propre grand-mère, Ishola Akpo met en perspective l’importance de cette dot reçu il y a 80 ans et témoigne d’une tradition africaine forte en l’ancrant tout d’abord dans sa propre histoire et sa subjectivité. Cette étape est pour l’artiste la première d’une réflexion globale sur la question de la dot qu’il souhaite poursuivre en imaginant ce que pourrait être les dots dans le futur.

Projet plastique autant que sociétal, cette série nous parle des traditions qui fondent nos cultures et de la manière dont elles sont perçues aujourd’hui à travers le regard d’un petit fils sur sa grand-mère, regard à la fois perplexe, aimant, critique mais conscient qu’il ne peut pas tout voir, l’essentiel étant invisible pour les yeux.

Texte Estelle Lecaille, curatrice indépendante / mòsso

*Le titre fait référence à un vers de Saint-Exupéry dans “Le petit prince” (1943)

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo

L'essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo
L’essentiel est invisible pour les yeux, 2015 © Ishola Akpo