WIRD – Bruno Hadjih

Dans le soufisme le Wird est la pratique par laquelle est différenciée une voie mystique d’une autre. Le Wird permet de transmettre le secret qui attachera le maître à son élève. Le wird est un ensemble d’incantations, de prières, et de respirations qui mène au « hal », à l’absolu. Le Hal est l’extinction de soi dans l’autre.

L’expérience soufie dépasse les clivages que la société met en place, les problématiques identitaires s’annulent. Là où la pratique du soufisme est permise, la société est rarement à l’écoute des intégrismes. Cette recherche est aussi ce qui nous constitue. Elle est la part qui nous relie aussi bien à l’univers qu’à notre partie nucléique.

Ce qui sépare les hommes s’annule lorsqu’ils se retrouvent à expérimenter un état de grâce et de souffle, que ce soit à Montreuil, dans le sud algérien ou n’importe où ailleurs dans le monde. Il n’est plus question d’individu mais de présence.

Le paysage, la nature sont parties intégrantes de cette beauté. Ce sont des lieux de fixation et de révélation.

Si par le passé, j’allais loin pour photographier ces soufis, ma rencontre avec des confréries du Sahel à Montreuil ou en île de France, a transformé mon approche du sujet. C’est dans ces lieux ordinaires, intimes et clos, presque souterrains que j’ai trouvé mon écriture photographique.

C’est à Montreuil que le schéma de la représentation commençait à se dessiner. Dans ces lieux impersonnels et insignifiants, j’ai compris qu’il n’est pas nécessaire d’aller loin pour rencontrer ce qui est proche.

Pendant 20 ans, j’ai continué à les fréquenter et à fixer leur présence.
Le matériel utilisé répond aux attentes liées à ma pratique photographique. Différents formats sont utilisés; 24×36, 6×7, 6×6 et 4×5 inch, avec des films argentiques. Le format des négatifs a son importance. Il est mon rapport au temps. On n’est plus dans l’instantané, on est d’avantage dans la mise en scène de la prise de vue. Le format participe de l’élaboration même du discours à venir.

ACTUALITE

La série Wird est actuellement exposée dans l’exposition « Croyances, Faire et défaire l’invisible », à l’Institut des Cultures d’Islam. Cette exposition rassemble seize artistes photographes, vidéastes et performeurs, qui se saisissent de façon poétique, critique ou décalée de la question du “ Croire”. Ils donnent à voir différentes nuances des représentations des croyances sur le continent africain, revendiqué comme lieu d’expérimentation, de glissements, de frictions et de négociations. C’est une affirmation de cosmologies possibles, augmentées par des siècles de croisement et de flux humains.

L’exposition embarque les visiteurs dans les vibrations de la transe et les mystères de l’envoûtement. Les six images issues de Wird, travail mené depuis de longues années à travers le monde par Bruno Hadjih, ont été réalisées en Algérie. Elles immergent le spectateur à travers un voyage sensoriel dans la mystique du soufisme. L’auteur en revendique l’universalité : en dépassant les clivages que la société met en place, elle permet l’annulation des problématiques identitaires. A travers des photographies de paysages et de transes individuelles et collectives, Hadjih dévoile un état de grâce.

A PROPOS DE BRUNO HADJIH

Bruno Hadjih est né en Kabylie en Algérie. Il vit et travaille entre Paris, le Gers et le Sahara. Après des études de sociologie, il s’oriente vers la photographie documentaire, plasticienne. Ses travaux portent particulièrement sur la redéfinition des espaces décrits comme intangible, espace mental, espace géographique.

Réflexion ou regard neuf porté sur le monde méditerranéen, son histoire, sa culture et ses relations avec le reste du monde, le travail de Bruno Hadjih n’est pas une interrogation mais une prise de position, un engagement.
Son travail a été exposé dans divers musées et festivals : BNF, CCCB Barcelone, Musée-Herzilia, Museum of the African Diaspora (MOAD) San Francisco, Visa pour l’image, Biennale Africaine de la photographie à Bamako, Biennale de photographie du monde arabe. Depuis plus de 21 ans, Bruno Hadjih mène une réflexion sur le soufisme : WIRD. Fin 2020, un essai documentaire prolongera ce travail. Après les expositions et le film AT(H)OME, une parution d’un livre est prévue courant 2020.

© Bruno Hadjih
© Bruno Hadjih
© Bruno Hadjih
© Bruno Hadjih
© Bruno Hadjih
© Bruno Hadjih
© Bruno Hadjih
© Bruno Hadjih
© Bruno Hadjih
© Bruno Hadjih