Léopard

Cette série commence par une rencontre, lorsque j’étais en résidence à Paris dans le cadre de la bourse de recherche et créations du Conseil des Arts. À la recherche de modèles à la sortie du métro Château – Rouge, je rencontre une dame qui me donne rendez – vous pour la photographier. À cette occasion elle revêt un boubou au motif léopard, splendide. L’image de cette femme m’habite pendant les jours qui suivent. Alors que je sillonne Paris, je prends conscience de la popularité de cet imprimé animalier porté partout et par tous, à la fois à Château Rouge, Saint Germain des Prés ou dans le 16ème arrondissement.

Cette rencontre avec le léopard me fait réfléchir à des photographies prises à l’époque coloniale, portraits de rois Africains portant du léopard. L’universalité de ce motif m’apparaît alors comme un sujet à explorer, j’étudie son histoire et ses symboliques qui varient selon les pays, les sujets et les évènements.

La fourrure du léopard en Afrique est synonyme de pouvoir. Cette représentation forte trouve racine dans la mythologie existant autour de l’animal, il est au Congo le roi de la jungle, le plus rapide, le plus dangereux, un symbole de courage et de puissance. La peau du léopard devient pour les chefs africains un emblème, une incarnation de leurs valeurs et leur permet de renvoyer à leurs sujets et au monde l’image d’un chef puissant et respecté. En Occident comme en Afrique, elle symbolise la richesse et le pouvoir, jusqu’à devenir un symbole national avec la fameuse toque portée par le Maréchal Mobutu Sese Seko au Congo.

L’Occident joue un rôle déterminant dans la popularisation du motif lorsque le couturier Christian Dior en 1947, époque à laquelle il incarne l’avant-garde et l’audace dans le monde de la mode, créé son imprimé léopard baptisé « Jungle » et sa robe « L’Africaine ». Le léopard, jusqu’ici réservé aux femmes de petite vertu et négativement connoté, fait son entrée dans le monde de la haute couture. L’imprimé devient incontournable, on le retrouve dans le prêt-à-porter et démocratisé par les grands couturiers comme Roberto Cavalli qui en fait sa signature, il infiltre la mode urbaine à travers le monde. Il s’universalise et se libère du poids culturel qui lui est attribué porté à la fois en Afrique et en Occident. La signification du motif évolue avec les époques, les pays et les cultures. Partout il est porteur de sens, cette série de portraits m’a amené à parcourir le Monde, du Texas à Libreville, de Clermont Ferrand à Dakar, de Paris au Kwazulu-Natal… autant de personnalités rencontrées que de « léopard » différents.

Chaque sujet photographié dans cette série « léopard » illustre une utilisation et une vision différente de l’imprimé ou de la fourrure. Chacun le porte et l’incarne. Arielle Dombasle l’élève en symbole d’une absolue féminité sur l’inspiration de sa styliste Marie Beltrami pour qui le léopard est une passion. Larry, artiste tatoueur, en a fait sa seconde peau, qui le protège et l’isole d’un monde auquel il ne souhaite plus appartenir. L’excentricité inhérente à ce motif rend chacun d’entre eux unique et atypique. Ils sont différents, ils affirment et exposent aux yeux du monde leurs particularités et leurs personnalités, quelque soient leurs origines et leurs lieux de vie. Le léopard est une occasion unique qui nous donne l’opportunité de faire progresser la conversation  sur ce qui nous lie en tant qu’êtres humains malgré nos diverses origines ethniques, sociales ou culturelles.


**ACTUALITES

Exposition  » From Mobutu to Beyonce » au Bronx Documentary Center, New York, du 15 avril au 4 juin 2017

Une partie de cette série sera présentée sur la galerie Magnin à 1:54, Contemporary African Art Fair qui se tient à Pioneer Works, Brooklyn du 5 au 7 mai 2017

Exposition Afriques Capitales, à Lille du 6 avril au 3 septembre 2017

© Emilie Régnier
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Arielle Dombasle au Musée de la Chasse et de la Nature, Paris© Emilie Régnier
Arielle Dombasle au Musée de la Chasse et de la Nature, Paris© Emilie Régnier

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