Ils témoignent à la fois de l’histoire de ces peuples et de ces pratiques mystico-religieuse, indissociables de la traite orientale, et à la fois de la richesse de ce patrimoine immatériel. Même si les pratiques ont évolué de manières nuancées selon les pays, ces musiciens prennent leur origine commune dans une affiliation symbolique à Sidi Bilal, premier muezin de l’Islam et un des premiers esclaves noirs affranchis par le Prophète Mahomet.
Leur intégration au monde arabe a pu se faire en se mêlant aux pratiques et croyances de l’Islam.
Ce culte, qui fait appel à la musique et à la danse, invoque les esprits par un phénomène de possession ritualisé où le corps des adeptes entre en transe. Offrant ainsi guérison et divination.
Entre rituel sacré et musique profane, Algo nous invite à entrer dans l’intimité de ces musiques qui bercent les corps jusqu’à la transe.
Le culte de génies de la communauté noire maghrébine nous amène à traverser la route empruntée par les esclaves. C’est la première pierre du projet sur la route des musiques de transe autour de la Méditerranée: « TRANSEMEDITERANEAN PROJECT »
** La Tunisie et le stambali
Après la ville portuaire d’Essaouira (Maroc) et les musiciens Gnawa, Tunis nous invite à pénétrer un univers nocturne qui, au cours du mois de Chaâban du calendrier lunaire musulman, nous entraîne dans un monde où la musique devient une clé. Riadh Zawech , nous ouvre les portes de la Zaouia Sidi Ali Lasmar, sanctuaire des stambalis de Tunis. Riadh est Arif- « Celui qui sait » incarne les divinités. Adolescent, il a été choisi par les esprits pour être ce pont entre le monde du surnaturel et le monde des humains. Les adeptes le consultent pour révéler l’origine surnaturelle de la maladie et organiser le rituel.
Nous sommes ici au coeur de la médina. Les étroites rues sinueuses dissimulent cette petite porte jaune qui, une fois ouverte nous attire vers un univers qui brille à la lueur des bougies. La préparation de cette fête-rituel témoigne d’une certaine agitation dans l’air.
Les musiciens entrent et déposent leurs instruments à leurs côtés. Pendant que le Maâlem accorde son guembri, des adeptes glissent discrètement dans la chambre du locataire ad viternam, le saint Sidi Ali Lasmar puis entament des prières de bénédiction en brûlant l’encens sacré. Dehors, Les joueurs de chkachek brûlent le charbon du narguilé et laisse échapper de leur bouche une épaisse fumée au parfum d’Orient.
L’heure approche, le guembri résonne, les voix entament les chants qui rendront grâce au prophète. Les esprits Blancs se préparent à entrer en scène.
La musique joue, ici, le rôle d’une mise en ordre du Cosmos.
Un monde où des entités surnaturelles cohabitent avec le monde des humains et qui sont à la fois la cause de différents maux, maladies, mauvais sorts et à la fois leur remède.
Sa fonction est avant tout thérapeutique car elle soigne. La transe résulte de l’alliance entre l’esprit invoqué et le corps des initiés.
Le thème transversal de ce projet qui parcours l’ensemble du Maghreb nous invite à pénétrer dans l’intimité de ces musiques et à toucher ainsi aux croyances mystiques d’une partie de la population maghrébine. Tout en posant une question sur un enjeu contemporain.
La singularité de ces musiciens est de se situer à la frontière de deux univers.
Un pied dans le monde du sacré et mystique, une corde dans le monde du profane.
Parfois sur scène pour montrer une forme de folklorisation de cette pratique, souvent dans un travail musical artistique où les traditions rejoignent la création.
La frontière est mince et perméable. La musique lie ces deux mondes qui s’articulent au quotidien. Ce projet documentaire veut témoigner de l’évolution d’une pratique musicale qui puise son origine dans le sacré.
Prochaine étape: Le Diwan d’Algérie • 2009
Pèlerinage des Gnawa de Moulay Brahim, Maroc • 2009
A suivre…
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