De 1951 à 1965 en particulier, le magazine Drum a été une plateforme pour l’émergence d’une génération de photojournalistes sud-africains engagés dans la lutte contre l’Apartheid.
Mais c’est surtout en documentant des moment clés qui ont jalonné les combats contre les injustices du régime de l’Apartheid que les photographes de Drum vont établir leur réputation. Certaines de leurs photos vont devenir des icônes de l’histoire de l’Afrique du Sud et révéler au monde entier la réalité du système.
Bob Gosani, entré à Drum à 17 ans comme coursier au début des années 50, va vite devenir un des photographes les plus célèbres. Il est l’auteur de nombreuses photos qui ont marqué l’histoire de l’Afrique du Sud comme le reportage réalisé d’un toit voisin de la prison The Old Fort à Johannesburg, témoignant du traitement humiliant des prisonniers, connu sous le nom de « Tausa Dance ». Ces photos publiées dans Drum en mars 1954 ont déclenché un débat public et forcé le gouvernement à intervenir pour en interdire la pratique. Pendant le Procès de la Trahison (« The Treason Trial »), étalé de 1956 à 1961, Bob Gosani signera aussi une photo devenue fameuse montrant le jeune Mandela dans un match improvisé avec la star de la boxe, Jerry Moloi.
Pendant ce temps les conditions d’exercice pour les photographes vont
devenir plus difficiles. Pour Peter Magubane, entré à Drum en 1954 où il y est resté jusqu’en 1963, « photographier était un acte militant. J’avais le devoir d’utiliser mon appareil photo pour montrer aux sud africains et au monde entier ce qui se passait dans notre pays ».
Le climat va s’assombrir à partir de 1959 avec la destruction par les bulldozers du quartier de Sophiatown, et devenir plus hostile encore pour les photographes après « Le massacre de Sharperville » en mars 1960, où 69 manifestants pacifistes rassemblés contre les « Pass Laws » qui imposaient aux noirs un passeport intérieur pour circuler, furent tués par la police. Ce sont les photos de Peter Mugabane mais aussi, celles de Ian Berry, photographe britannique fraichement émigrés, qui vont alerter l’opinion internationale sur la brutalité du régime sud-africain. Drum a été ensuite interdit de 1965 à 1968.
Entré dans la légende, le magazine Drum ne cesse d’être redécouvert à travers films, livres et expositions. Une de ses plus grande force a été de mettre l’accent sur la formation de jeunes photojournaliste sud-africains. En ce sens, « L’école Drum » a participé à l’écriture de quelques chapitres d’une histoire de la photographie en Afrique du Sud.
Cependant, ces archives historiques conservées par le fond Bailey African History Archives, géré par les héritiers de Jim Bailey l’ancien propriétaire de Drum, laissent apparaitre encore des zones d’ombres. Un litige persiste depuis quinze ans concernant des crédits erronées sur l’attribution de certaines photos, des problèmes de copyright sont toujours irrésolus et surtout les photographes n’ont jamais pu récupérer l’ensemble de leurs négatifs … Pour les anciens photographes de Drum, le combat continu.